À l’occasion de la 35ème session du COFI, qui se déroule durant l’Année internationale de la pèche et de l’aquaculture artisanales, des organisations de pêche de six continents ont identifié cinq domaines prioritaires d’action pour les membres de la FAO à l’horizon 2030.
La 35ème session du Comité des Pêches de la FAO (COFI – 5 au 9 septembre), ainsi que le Sommet sur la pêche à petite échelle qui précède (2 au 4 septembre) mettront à l’honneur les femmes et les hommes de la pêche artisanale, utilisateurs de l’océan les plus nombreux, et dont les contributions majeures aux moyens de subsistance, à l’emploi, à la sécurité alimentaire et aux revenus, contrastent avec leur marginalisation dans la prise de décisions.
Les gouvernements réunis au COFI débattront notamment de l’appui à donner à la pêche artisanale. En cette année internationale de la Pêche et de l’Aquaculture artisanales, les pêcheurs d’Afrique, du Pacifique, d’Amérique centrale et du sud, d’Asie et d’Europe, ont identifié cinq domaines d’action pour les gouvernements afin que, en dialogue avec les communautés de pêche artisanale de leur pays, ils offrent un avenir durable à ces communautés à l’horizon 2030 :
- Garantir d’urgence un accès préférentiel et cogérer 100 % des zones côtières ;
- Garantir la participation des femmes et soutenir leur rôle dans l’innovation ;
- Protéger la pêche artisanale des secteurs concurrents de l’économie bleue ;
- Faire preuve de transparence et de redevabilité dans la gestion de la pêche ;
- Construire des communautés résilientes face au changement climatique et donner des perspectives à la jeunesse.
Pour la mise en œuvre de ces priorités, enracinées dans les Directives Volontaires pour une pêche artisanale durable de la FAO, la mise en place d’un dialogue permanent entre gouvernements, et avec les communautés de pêche, est essentiel. Dès lors, nous soutenons la FAO dans ses efforts pour pérenniser des mécanismes de dialogue entre gouvernements, avec la participation active des pêcheurs, sur la mise en œuvre des Directives sur la pêche artisanale durable.
La question de l’économie bleue sera également à l’ordre du jour. Le dernier rapport sur la situation mondiale des pêches et de l’aquaculture (SOFIA 2022) est intitulé « vers une transformation bleue ». La croissance de l’économie bleue fait aujourd’hui une peur bleue à la pêche artisanale, car ses moyens de subsistance sont menacés par la concurrence et les impacts négatifs d’industries maritimes et terrestres plus puissantes, comme l’exploitation de gaz et de pétrole, le tourisme, mais aussi l’aquaculture industrielle. Ainsi, lorsque la FAO s’engage à « garantir que l’intensification et l’expansion de l’aquaculture durable continuent à satisfaire la demande mondiale d’aliments aquatiques », nous pensons aux dégâts importants occasionnés à nos communautés par l’aquaculture intensive dépendant de la farine de poisson, comme l’élevage de saumon ou les crevettes, qui détruisent nos côtes et nos ressources. Pour nous, c’est l’approche de précaution qui doit primer. Aucune nouvelle utilisation des océans ne doit être autorisée, ni soutenue, si elle a un impact négatif sur les écosystèmes aquatiques ou les communautés qui en dépendent pour vivre.
Le COFI discutera également de l’intégration systématique de la biodiversité dans le secteur de la pêche et de l’aquaculture. La pêche artisanale soutient les initiatives de conservation, pour autant qu’elles reconnaissent et protègent les droits de propriété, d’occupation, d’accès et d’utilisation des ressources des communautés locales, donnant la priorité aux systèmes de gouvernance participatifs. Les stratégies de protection et de gestion durable de l’environnement doivent aussi aller au-delà du slogan « 30% des océans protégés pour 2030 ». Il est nécessaire de s’attaquer aux moteurs de la dégradation des ressources et de la perte de biodiversité qui affectent également les 70 % restants et nous insistons sur l’urgence de mettre en œuvre une approche de la conservation marine basée sur les droits de l’homme.
Les communautés de pêche artisanale sont en première ligne de ceux qui subissent les impacts du changement climatique : disparition des récifs coralliens, des mangroves et d’autres habitats clés, élévation du niveau de la mer, érosion côtière, augmentation de la fréquence et de l’intensité des tempêtes, réduction des captures, espèces invasives. Cela a des conséquences directes sur nos moyens de subsistance et sur la sécurité alimentaire des populations. Le Plan d’Action de la FAO relatif au changement climatique sera bien sûr un élément important pour répondre à cette situation. Nous insistons que dans ce cadre, des structures de gouvernance consultatives permanentes et transparentes impliquant des représentants de la pêche artisanale soient mises en place, pour donner une réponse efficace et adaptée aux catastrophes et aux situations d’urgence après des événements climatiques extrêmes, en veillant à ce que des fonds suffisants soit apportés, et gérés de façon transparente au niveau local.
Les enjeux qui vont être discutés au COFI 35 sont d’une importance capitale pour l’avenir de la pêche artisanale. Il est essentiel que les femmes et les hommes de la pêche artisanale participent pleinement à un dialogue juste et équitable et que la participation des communautés concernées débouche sur une action commune. Comme nous l’avons déclaré à la Conférence des Nations unies sur l’océan (UNOC) :
Citations de représentants de la pêche artisanale :
Gaoussou Gueye, président du CAOPA (Sénégal) :
« Nous sommes prêts à travailler avec vous, décideurs, donateurs et ONG, pour sauver notre océan, notre mère commune. Mais pour bien travailler ensemble, il nous faut un consentement, un accord, une définition de ce qu’est un bon partenariat. Nous sommes prêts à travailler avec vous dans la transparence et le respect mutuel. Allez-vous nous rejoindre ? »
« Là où il y a la faim, il n’y a pas de conservation ».
Maria Carrillo : Coordinatrice de l’Association des femmes transformatrices de crevettes à Barra del Colorado (Costa Rica).
« Il semble que nous, femmes des côtes et des mers, et notre travail, soyons invisibles au monde. »
Lavenia Naivalu, représentante du district de Nacula dans les îles Yasawa (Fidji) et pêcheuse (Fidji).
« Nous avons besoin de plans et de politiques de gestion de la pêche plus redevables et plus transparents, qui incluent les communautés autochtones et locales et les femmes pêcheurs. Nous devons connaître le nombre de licences de pêche accordées, savoir si elles sont conformes aux plans de gestion, combien de revenus elles génèrent et si une partie de ces revenus peut être réinvestie dans la gestion. »
Signataires du communiqué de presse
La Confédération africaine d’organisations professionnelles de pêche artisanale (CAOPA)
Le Réseau International de zones marines gérées localement (LMMA International)
Le Réseau des aires marines de pêche responsable et des territoires marins de la vie (RAMPR)
La Plateforme de pêcheurs à faible impact d’Europe (LIFE)
Sindicato de trabajadores del Mar SITRAMAR, Bocas del Toro territorio Comarcal Gnobe Bugle Comarcal, Panamá
Ostra Comichin, Nayarit, México
LARECOTURH, La Ceiba, Honduras
Voir le communiqué en anglais, espagnol et portugais (pdf)