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Déclaration de la CAOPA – UNOC3, Nice, juin 2025

Je me nomme Gaoussou GUEYE, je m’exprime aujourd’hui au nom de la Confédération africaine des organisations professionnelles de la pêche artisanale (CAOPA), qui fédère des femmes et des hommes engagés dans la pêche artisanale maritime et continentale, à travers 29 pays du continent africain.

Nous sommes venus ici, à Nice, pour porter une voix trop souvent oubliée :
celle des communautés côtières, des transformatrices, des pêcheurs artisans, des jeunes qui vivent de l’océan, pour l’océan.

La pêche artisanale, pilier stratégique d’une économie bleue inclusive

La pêche artisanale n’est ni un secteur marginal, ni un vestige du passé.
Elle est un levier économique, social, alimentaire et culturel pour des millions d’Africains.
Elle contribue chaque jour à nourrir nos populations, à faire vivre nos marchés locaux, à préserver les savoirs et les équilibres marins.

Contrairement aux modèles industriels tournés vers l’exportation, la pêche artisanale est un vecteur de souveraineté alimentaire, un filet de sécurité socio-économique pour les plus vulnérables, et un espace d’autonomisation pour des milliers de femmes.

Pourtant, ce secteur fait face à une double pression :
→ La surexploitation des ressources et le changement climatique
→ L’expansion non régulée des autres secteurs de l’économie bleue : tourisme, infrastructures portuaires, aquaculture industrielle, énergie offshore…

Nous tirons la sonnette d’alarme.

Trop souvent, la planification de l’espace maritime se fait sans les communautés qui dépendent de la mer.
Trop souvent, les décisions sont prises sans consultation, sans compensation, sans équité.

Nous rappelons que l’économie bleue ne pourra être durable si elle exclut ceux qui vivent de l’océan.

Ce que nous demandons à nos États et à nos partenaires :

  1. Garantir les droits d’accès et les droits fonciers des communautés de pêche artisanale
    → Cela implique une reconnaissance juridique claire et des mécanismes de protection dans les politiques nationales et régionales.
  2. Soutenir la cogestion et la participation réelle des communautés à la gouvernance bleue
    → Avec des espaces dédiés à la pêche artisanale, co-gérés, intégrant les savoirs écologiques traditionnels, et respectant le principe de précaution.
  3. Investir dans les femmes, les jeunes, et les chaînes de valeur locales
    → Via des mécanismes de financement spécifiques, des infrastructures adaptées, des dispositifs de protection sociale et de sécurité au travail.
  4. Aligner les politiques océaniques avec les engagements du continent africain
    → Notamment l’Initiative de la Ceinture Bleue, la Déclaration de Kampala, et les priorités du Programme Détaillé de Développement de l’Agriculture en Afrique (PDDAA) post-Malabo, qui reconnaissent tous la pêche artisanale comme un secteur stratégique.
  5. Protéger les petits pélagiques pour la sécurité alimentaire
    → En réservant des zones à la pêche artisanale et en régulant les industries qui détournent le poisson pour la farine et l’huile, au détriment de la nutrition humaine.

L’heure est venue d’agir. Pas seulement de débattre.

Nous demandons à nos États, à nos partenaires techniques, à nos bailleurs et aux institutions multilatérales :

De ne pas soutenir de projets qui menacent les écosystèmes et les communautés locales.
De co-construire avec les communautés des pêcheurs, et non de décider pour elles.
De faire de la pêche artisanale une priorité claire de l’Agenda 2030, et de l’Agenda 2063 de l’Union africaine.

L’océan ne peut être durablement protégé sans ceux qui y vivent.
La pêche artisanale n’est pas un obstacle au progrès, elle en est la condition.

Lors de cette UNOC3, nous avons l’opportunité historique d’affirmer une économie bleue inclusive, juste et durable, fondée sur les droits humains et le respect des territoires.
Ne laissons pas passer cette chance.

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